Construire une offre lisible et différenciante pour un cabinet de conseil

Construire une offre lisible et différenciante pour un cabinet de conseil

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Dans un secteur où 80 % des cabinets de conseil se présentent avec les mêmes mots-clés – transformation digitale, création de valeur, accompagnement stratégique – la question est simple : pourquoi un prospect choisirait-il votre cabinet plutôt qu’un autre ?

La réponse ne réside pas seulement dans l’expertise (quasi tous peuvent la revendiquer), mais dans la capacité à structurer et communiquer une offre lisible, compréhensible en 30 secondes et clairement différenciante.

Pourquoi la lisibilité est un enjeu vital

Un dirigeant d’ETI ou de grand compte ne lit pas vos slides comme un étudiant lit un syllabus. Son temps est rare. Lorsqu’il ouvre une proposition ou votre site, il se pose trois questions :

  1. Est-ce que ce cabinet est fait pour mon profil (ETI industrielle, banque, start-up scale-up…) ?

  2. Est-ce qu’il comprend mes problèmes (croissance, réduction des coûts, gouvernance IT, transformation RH…) ?

  3. Pourquoi lui plutôt qu’un autre qui propose la même chose ?

Or, selon une étude Hinge Research sur la croissance des cabinets de conseil (2023), près de 63 % des acheteurs B2B estiment que les cabinets “se ressemblent trop” et qu’ils peinent à distinguer la valeur unique de chaque prestataire.

Conséquence directe : sans lisibilité, l’offre est rangée dans la catégorie “cabinet générique” → guerre des prix → faible fidélisation.

Quelques erreurs qui vous font perdre en lisibilité

Une offre lisible, ce n’est pas une liste de compétences. C’est une promesse claire, orientée client et formulée dans la même langue que lui.

Ne pas partir des douleurs du client

Par exemple :

« Conseil en transformation digitale » → « Réduire vos coûts IT de 20 % en 12 mois grâce à une gouvernance adaptée »

La deuxième formulation part du problème (coût IT) et annonce un résultat mesurable (20 %).

Ne pas assumer un focus sectoriel ou fonctionnel

Beaucoup de cabinets veulent “ne pas se fermer de portes”. Résultat : leur offre est trop vague.

À l’inverse, un cabinet qui annonce :

  • « Nous aidons les ETI industrielles à optimiser leur supply chain »

  • « Nous accompagnons les directions financières des banques dans la digitalisation de leurs reportings »

paraîtra beaucoup plus crédible.

Ne pas définir un message pivot en une phrase test

Si un prospect n’a pas compris votre valeur en 30 secondes, votre offre n’est pas lisible.

Un bon test : formulez votre proposition comme si vous deviez la pitcher à un DG dans un ascenseur.

Quelques leviers de différenciation réels

La spécialisation verticale (secteur ou problématique)

Les cabinets qui se développent le plus vite ne sont pas ceux qui “font de tout”, mais ceux qui s’imposent comme experts d’une niche identifiable.

Exemple : Wavestone a bâti une partie de son succès en se positionnant comme spécialiste de la cybersécurité dans les grandes organisations.

La preuve par les chiffres et cas clients

  • « Nous avons automatisé 33% des tâches manuelles et permis un gain de productivité notable de 20%. »

  • « Nos clients réduisent en moyenne de 2 jours leurs délais de traitement de stock. »

Les décideurs du B2B sont sensibles aux KPIs concrets. Ce type de différenciation est beaucoup plus fort qu’un jargon creux.

N’hésitez pas à produire des articles “pratiques” sur ces études de cas clients, avec un maximum d’explication et de détails sur la méthodologie utilisée, les difficultés rencontrées par vous et le client. Vous pourrez ensuite décliner ce document en différents contenus pour alimenter vos actions commerciales et marketing ; Un post LinkedIn, une vidéo sur YouTube et sur votre site internet, une newsletter.

Je recommande d’utiliser la trame STAR (Situation, tâches, activités, Résultats) pour donner un retour d’expérience complet à vos clients. Ce document vous servira pour vos démarches de prospection, de réponse à appel d’offres, pour attirer des talents et gagner en image de marque.

La méthode propriétaire

Créer une méthode nommée et structurée (framework, acronymes, modèle en 4 étapes) augmente la mémorisation et crédibilise l’expertise.

Exemple : Capgemini a développé leur approche Inventive IT pour conduire des transformations organisationnelles de bout en bout en intégrant innovation, data, expérience client et durabilité.

Vous n’avez pas besoin de créer un framework révolutionnaire pour avancer dans cette démarche.

Démontrez que vous avec une approche unique pour résoudre les problèmes de vos clients et vous distingue clairement de vos concurrents qui utilisent eux uniquement des frameworks existants.

Le contenu expert comme levier de différenciation

Publier des études sectorielles, des baromètres annuels ou des cas clients détaillés permet de devenir une référence. Selon Edelman & LinkedIn (2021), 65 % des dirigeants déclarent qu’un contenu expert bien construit augmente fortement la probabilité de travailler avec un prestataire.

De nombreux cabinets ont réussi à devenir des références dans leur domaine grâce à cette stratégie. Je pense notamment à Wavestone qui publie régulièrement ses “Radars” pour mettre en lumière certaines tendances.

Exemple avant/après d’une offre générique

Avant (site web classique)

« Cabinet de conseil en organisation et en transformation. Nous accompagnons nos clients dans leurs projets de changement, de la stratégie à l’opérationnel. »

➡️ Perçu comme : un cabinet parmi tant d’autres.

Après (offre lisible et différenciante)

« Nous aidons les ETI industrielles à générer +15 % de productivité en 12 mois en digitalisant leurs process achats et supply chain. »

➡️ Perçu comme : un cabinet spécialisé, orienté résultats, qui parle le langage de ses clients.

Le Value Proposition Canvas : un outil clé pour clarifier votre offre

Le Value Proposition Canvas (VPC), développé par Alexander Osterwalder, est un cadre visuel qui aide à confronter son offre à la réalité des besoins clients. Il se compose de deux blocs principaux :

  • Le profil client

    • Jobs : ce que le client cherche à accomplir (ex. réduire ses coûts IT, signer de nouveaux clients, sécuriser sa supply chain).

    • Pains : les obstacles ou frustrations qui l’empêchent d’y parvenir (ex. dépendance à 2-3 comptes majeurs, manque de commerciaux chasseurs, projets internes qui traînent).

    • Gains : les bénéfices attendus (ex. croissance prévisible, fidélisation des grands comptes, process commerciaux efficaces).

  • La proposition de valeur

    • Produits & services : ce que propose concrètement le cabinet (conseil en stratégie IT, accompagnement commercial, transformation RH…).

    • Pain relievers : comment l’offre soulage les douleurs du client (ex. externaliser la prospection → réduit la charge des associés).

    • Gain creators : comment l’offre génère des gains tangibles (ex. structurer un process CRM → pipeline prévisible et mesurable).

source : B2B International

Pourquoi le VPC est pertinent pour votre cabinet de conseil ?

Parce que trop de cabinets parlent en termes de méthodologies internes (“nous avons une expertise unique en Lean, Agile, digitalisation…”) au lieu de problèmes et résultats clients.

Le VPC oblige à formuler l’offre en miroir direct des attentes des décideurs (DG, DSI, associés d’ETI).

Comment l’adapter à vous ?

  • Travaillez le VPC par segment de clients (ETI industrielles ≠ scale-ups tech).

  • Traduisez les “jobs” clients en enjeux stratégiques concrets (croissance, compétitivité, résilience).

  • Décrivez vos offres non pas comme des “prestations”, mais comme des pain relievers & gain creators.

  • Validez la pertinence par des cas clients chiffrés et non uniquement par des promesses.

Quelques conseils pour remplir efficacement votre VPC.

La valeur du VPC ne réside pas seulement dans son schéma, mais dans la façon dont on le remplit pour assurer un alignement entre tous les parties de votre cabinet.

1. Constituez l’équipe autour de la table

  • Qui inviter ?

    • 1 associé dirigeant (vision stratégique, arbitrage final).

    • 1 profil orienté delivery (manager ou consultant senior, proche du terrain client).

    • 1 profil orienté business development (si présent, ou un associé en charge des ventes).

    • Optionnel : 1 client de confiance ou ex-client (regard externe précieux).

  • Pourquoi ?

    • Éviter l’entre-soi d’associés uniquement.

    • Garantir que la voix du terrain et du marché soit représentée.

2. Temps et organisation du processus

  • Nombre de workshops : 2 à 3 séances de 2h (espacées d’une semaine).

  • Pourquoi plusieurs séances ?

    • La première génère beaucoup d’idées (parfois trop floues).

    • La deuxième permet de prioriser, challenger et reformuler.

    • La troisième (facultative) sert à valider les wording finaux et tester sur un échantillon.

  • Préparation individuelle :

    Chaque participant prépare à l’avance :

    • Une liste de 3 jobs typiques observés chez les clients.

    • 2 exemples de pains concrets vécus par les clients.

    • 2 exemples de gains attendus exprimés par les clients.

    • Des anecdotes ou cas clients précis (les meilleurs déclencheurs de vérité).

3. Questions à se poser pour chaque case du VPC

Profil client

  • Jobs (ce que le client veut accomplir)

    • Quels sont les 3 objectifs prioritaires de nos clients cibles ?

    • Exemple DG d’ETI : “Développer de nouveaux marchés” / “Rester compétitif face aux concurrents” / “Sécuriser ses process”.

  • Pains (les obstacles, frustrations, risques)

    • Qu’est-ce qui empêche nos clients d’atteindre leurs objectifs ?

    • Qu’est-ce qui les frustre aujourd’hui avec les cabinets de conseil existants ?

    • Exemple : “Ce sont des boites noires, on comprend pas ce qu’ils font”, “Ils sont trop cher par mais font tous la même chose”, “Ils dépassent toujours le planning et facturent des travaux supplémentaires”.

  • Gains (résultats et bénéfices attendus)

    • Qu’est-ce que le client considèrerait comme un succès tangible ?

    • Quels bénéfices “bonus” dépasseraient ses attentes ?

    • Exemple : “Avoir une roadmap claire et réaliste de sa transformation”, “Tenir les délais annoncés”, “Gagner des l’argent parce qu’il a réduit ses coûts sans perdre en qualité”.

Proposition de valeur

  • Produits & services

    • Quels services proposons-nous réellement (concrets, pas slogans) ?

    • Ex : “auditer les processus IT existants”, “mettre en conformité vis-à-vis d’une nouvelle règlementation”, “assurer la migration vers un nouveau logiciel entreprise”

  • Pain relievers (comment on soulage les douleurs)

    • Comment nos offres éliminent-elles les obstacles cités ?

    • Ex : Mettre en conformité sur une nouvelle règlementation → Eviter des pénalités et des mise en demeure pour non respect de la règlementation.

  • Gain creators (comment on crée des gains)

    • Quels bénéfices supplémentaires nos clients obtiennent-ils ?

    • Ex : transfert de connaissance et méthode de suivi dédiée → maintien en conformité plus facile à suivre et à assurer par le client.

4. Astuces pour réussir l’exercice

  • Interdisez le jargon interne. Si un client ne comprend pas, c’est que ce n’est pas lisible.

  • Basez-vous sur des verbatims clients. Relisez vos comptes rendus d’entretien, emails, retours d’ateliers. Ce sont les meilleures formulations.

  • Hiérarchisez. Ne gardez pas 10 jobs/pains/gains → limitez-vous à 3 maximum pour chaque case (ceux qui ont le plus d’impact).

  • Testez à chaud. Une fois le VPC rempli, confrontez vos formulations avec un client pilote ou un contact de confiance : “Est-ce que vous êtes sensibles à ces arguments ?”

  • Visualisez. Utilisez un grand tableau mural, un Miro/Mural ou des post-its → la dynamique collective est clé.

Conclusion

Dans un marché saturé où la majorité des cabinets de conseil se présentent avec les mêmes promesses génériques (expertise, transformation, création de valeur), la différence ne se joue plus dans la technique, mais dans la capacité à rendre son offre lisible et différenciante.

Une offre lisible, c’est une offre que vos clients comprennent en 30 secondes : elle répond directement à leurs enjeux, elle parle leur langage et elle leur montre pourquoi vous êtes le choix évident.

Une offre différenciante, c’est une offre qui ne se contente pas de répéter le discours des concurrents, mais qui s’appuie sur :

  • un positionnement clair (secteur, problématique, persona),

  • des preuves tangibles (cas clients, KPIs, témoignages),

  • et une méthode structurée qui crédibilise votre démarche.

Le Value Proposition Canvas est l’outil idéal pour enclencher cette transformation : il permet de confronter vos services à la réalité des jobs, pains et gains de vos clients. Bien utilisé, avec l’équipe adéquate et une méthodologie rigoureuse, il devient une boussole pour repenser vos offres et les formuler avec impact.

Enfin, cette démarche doit déboucher sur un plan d’action concret : segmenter vos cibles, organiser vos ateliers VPC, reformuler vos offres en miroir des attentes clients, les valider par des preuves et formaliser une approche différenciante.

En clair, passer d’un discours centré sur “ce que vous faites” à un discours centré sur “ce que vos clients obtiennent”. C’est cette bascule qui transforme un cabinet “parmi d’autres” en un véritable “sparring partner” pour les ETI et Grands Comptes qu’il vise.

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