Libérer du temps aux associés pour le développement commercial de leur cabinet de conseil
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Dans la majorité des cabinets de conseil, les associés portent deux casquettes : délivrer les missions clients et développer le business.
Le problème ? La première occupe 80 à 90 % de leur agenda, ce qui fait passer la prospection au second plan, voire n’arrive jamais.
Or, sans temps consacré au développement commercial, pas de pipeline solide, pas de croissance durable.
Selon l’étude BenchPress Consultancy 2023, 44 % des cabinets de conseil citent le manque de temps pour le business development comme leur premier frein de croissance. Chez les plus petits cabinets (moins de 30 consultants), ce chiffre grimpe à 53 %.
À première vue, on pourrait croire que la solution est simple : il faut juste dégager du temps. Mais les associés savent bien qu’entre livrer un projet stratégique pour un client clé et passer deux heures à préparer une campagne LinkedIn, l’arbitrage n’est jamais évident.
Pourquoi les associés n’ont pas le temps de développer ?
Les discussions que j’ai eu avec des partners et les recherchent que j’ai mené ont mis en lumière plusieurs raisons qui expliquent ce déséquilibre :
Charge de delivery trop lourde : les associés restent en première ligne sur les projets.
Absence de relais internes : manque de managers capables de piloter le delivery.
Difficulté à prioriser : l’urgent (projet client) prend toujours le pas sur l’important (développement commercial).
Culture de l’expertise : en France et en Suisse, beaucoup d’associés se définissent d’abord comme consultants avant de se voir comme développeurs d’affaires.
En clair, tant que la vente reste “ce qu’on fait quand il reste du temps”, elle restera marginale.
Un monde où c’est possible
Pourtant, il existe un autre scénario.
J’ai eu l’occasion de travailler et d’échanger avec de nombreux associés de cabinets de conseil, et certains m’ont prouvé que l’équilibre était atteignable.
Quelques exemples concrets :
Certains partenaires allaient jusqu’à consacrer 30 % de leur temps par semaine au développement commercial, sans mettre en danger la qualité du delivery.
Dans certains cabinets, la gouvernance était claire : chaque associé portait la responsabilité d’un domaine d’activité (par secteur, par offre, par typologie de client). Cela évite la dispersion, chacun sait où concentrer ses efforts.
Ces associés travaillaient en binôme avec un manager dédié, qui prenait une partie du delivery et assurait le suivi opérationnel des prospects et clients de ce domaine.
Des pilotages commerciaux mensuels rassemblaient tous les associés et managers pour suivre les actions, redéfinir les priorités et ajuster la stratégie. Ces réunions n’étaient pas perçues comme une perte de temps, mais comme de véritables comités de pilotage au même titre que ceux menés chez leurs clients.
Dans ces cabinets, le développement commercial n’était pas une activité “en plus” du delivery, mais une activité structurée, partagée et pilotée.
Et la différence se voyait dans les résultats. Ils avaient un pipeline plus stable, des opportunités mieux qualifiées, moins de stress lié aux creux de missions.
Les bonnes pratiques pour libérer du temps
1. Sanctuariser des créneaux business
Fixer 20 à 30 % de son temps hebdomadaire au développement commercial et le protéger coûte que coûte.
Dans les cabinets anglo-saxons, c’est une norme : chaque associé a des objectifs commerciaux annuels et doit prouver comment il y consacre son temps.
2. Déléguer intelligemment le delivery
Un associé qui passe tout son temps en delivery ne peut mécaniquement pas développer le cabinet. Pourtant, beaucoup tombent dans ce piège, surtout dans les structures petites et moyennes.
Confier à des managers la gestion de mission permet à l’associé de se concentrer sur :
les aspects stratégiques du projet,
et le développement du portefeuille.
Faites monter les managers en responsabilité, structurez une pyramide équilibrée, clarifiez le rôle de l’associé dans la mission et capitalisez sur les compétences internes.
Les associés doivent accepter de lâcher une partie du contrôle opérationnel pour investir leur temps dans ce qui garantit la croissance du cabinet.
3. Structurer la gouvernance et les rôles
Attribuer à chaque associé un domaine de responsabilité commerciale (ex. secteur financier, offre data, ETI industrielles).
Cela clarifie qui fait quoi et évite les doublons ou les “angles morts” commerciaux.
Si vous êtes seul ou deux associés, cela ne change rien. Il faut prioriser et se spécialiser dans un ou deux secteurs d’activité les plus prometteurs pour votre cabinet.
C’est la clé de la différenciation.
4. Mettre en place des rituels commerciaux
Tenir des comités mensuels de pilotage commercial, avec les associés et managers.
Objectifs :
suivre les opportunités,
réajuster la stratégie,
partager les succès et les échecs,
instaurer une culture commerciale.
Ce rituel transforme la prospection en une activité collective et pilotée, plutôt qu’une contrainte individuelle. Cela vous permettra de bâtir et transmettre une culture commerciale à vos consultants senior et managers.
5. Standardiser et industrialiser ce qui peut l’être
Cette étape est super importante pour capitaliser sur vos apprentissages, gagner du temps et être plus efficace collectivement dans la démarche commerciale.
Il s’agit de créer votre Playbook commercial.
Créez des templates de propositions, documentez vos Ideal Customer Profiles, travaillez votre argumentaire téléphonique et votre pitch en rendez-vous, rédigez de mails type pour chaque étape de la relation avec un prospect, packagez certains diagnostics, utilisez un CRM.
En conclusion
Libérer du temps pour le développement commercial ne veut pas dire “travailler plus” ni “sacrifier la qualité des missions”.
C’est parfois une question de vie ou de mort pour certains cabinets de conseil. J’ai vu un cabinet d’une 50aine de consultants perdre la moitié de ses missions en l’espace de quelques mois. Difficile à rattraper à court terme si aucune démarche commerciale n’a été mise en place en amont.
Il faut savoir :
considérer le commercial comme une activité stratégique,
se donner une organisation interne qui le rend possible,
et instaurer des rituels collectifs qui ancrent cette discipline.
Certains cabinets l’ont prouvé : avec une gouvernance claire, une bonne répartition des rôles et un pilotage régulier, il est possible de consacrer 20 à 30 % de son temps au business development, même en continuant à délivrer.
Mais une fois ce temps dégagé, reste à répondre à une autre question clé : comment faire en sorte que tout le cabinet adopte une culture du business development ?